Nos emails sur les listes électorales sont privés

Où j’explique ma politique d’utilisation des adresses emails sur les listes électorales et où j’explique pourquoi cette utilisation se limite à l’envoi d’un seul email.

Depuis des années, nous communiquons nos adresses électroniques lors de nos démarches dans les ambassades et consulats. C’est très pratique et plus rapide que le courrier postal pour communiquer avec l’administration. Récemment Ces adresses ont aussi été ajoutées aux listes électorales. Comme les citoyens doivent être informés pour participer à la vie politique, ceci semble être une bonne idée.

Seulement depuis la présidentielle de 2012, nombre d’électeurs se sont plaints de l’utilisation de ces emails pour l’envoi répété de courriers de propagande. C’est hélas légal et la CNIL l’a rappelé sur une page qu’elle a publiée suite aux protestations qu’elle avait reçues en 2012.

La CNIL ne peut pas s’opposer à ce que les listes électorales soient récupérées (partis, candidats, élus) ou consultées par qui de droit (citoyens). Les utilisateurs doivent ensuite s’en servir dans un cadre défini (propagande électorale, contrôle), ce qui n’empêche pas le spam. On voit bien ici, que les gesticulations d’un candidat de la 8ème circonscription sont infondées. Les candidats et les partis peuvent obtenir une copie des listes électorales pour s’en servir dans leur campagne. L’article L330-4 que ce candidat invoque est d’ailleurs très clair sur le sujet.

Le Sénat a même rappelé en 2011 qu’il n’était pas necessaire d’obtenir le consentement préalable de la personne avant la transmission de ces données aux demandeurs.

L’esprit de la loi

Cependant, cette résolution est en contradiction avec les principes de la « loi informatique et libertés » qui garantit les droits d’information, d’opposition, d’accès et de rectification aux personnes identifiées par les données conservées. Mais les sénateurs ont estimé que ces droits étaient offerts au moment de la collecte dans les consulats. C’est hélas loin d’être le cas et l’AFE a souligné ces manquements.

Lors de la mise en place des opérations électorales pour les législatives de 2012, la CNIL a émis un avis un peu plus sévère en demandant aux consulats de respecter les droits d’information et d’opposition. Cela a aboutit à la création d’un second champ email dans le logiciel de gestion consulaire, dont le premier est uniquement réservé aux listes électorales et le second est utilisée par les services consulaires.

Cette implémantation rapide était buggée et le droit d’opposition n’est toujours pas respecté puisqu’il n’est pas possible, sur monconsulat.fr, de supprimer directement son email (le champ du formulaire est obligatoire).

Opt-in et Opt-out

Autre problème, certains partis politiques ont sauvegardé ces fichiers d’adresses comme abonnés d’une newsletter. La CNIL ne peut que conseiller de se désabonner de cette newsletter. Reste que cette pratique est illégitime. Depuis 2002, la directive européenne 2002/58/CE retient le principe du consentement préalable (opt-in) de l’internaute avant tout abonnement à une liste de diffusion.

Certains candidats peu regardants ont transformé ces listes d’emails en abonnements à leur newsletter bien trop régulières selon de nombreux avis. C’est normalement illégal mais il est difficile d’apporter la preuve qu’il s’agit de l’utilisation du fichier des LEC. Pour le moment, aucune plainte n’a abouti. La CNIL préfère recommander le de se désabonner (opt-out).

Dernier exemple en date, les amis de Sarkozy ont envoyé un courrier à tous les inscrits de 2012 (conservation de fichier) pour leur proposer d’adhérer à l’association de patronage d’un ancien président (utilisation non électorale).

Plus grave, une plainte est actuellement en cours auprès de la CNIL, pour l’utilisation de ce fichier par un institut de sondage (cession de fichier, utilisation non électorale) ayant interrogé les français résidents aux États-Unis en 2012.

Ce n’est hélas pas la seule utilisation de ce fichier pour usage commercial. Les abus sont trop nombreux, il devient urgent rendre aux citoyens leur droit à la vie privée. Le droit à l’information électorale est lui aussi fondamental. Il faut que les citoyens puissent voter en connaissance mais il est possible de concilier les deux.

L’information électorale sans le spam, c’est possible

Je propose que la liste électorale soit épurée de l’adresse électronique lorsqu’elle est transmise aux personnes qui en font la demande. Ensuite, les informations sur les candidats seraient envoyés par email directement par l’administration, organisatrice des élections, tout comme cela est fait avec la propagande papier.

D’ailleurs ceci permettrait de moderniser l’envoi des propagandes électorales en n’adressant la propagande papier qu’aux personnes ne pouvant pas la recevoir par email. Ceci serait source d’économie et premettrait une meilleure équité. En effet, Cela autoriserait aux petits candidats à s’exprimer avec les mêmes moyens que les grands partis (dont la campagne est payée par l’état).

Éthique et respectueuse de la vie privée, cette proposition n’a pourtant jamais été proposée. Est-ce parce que les personnes qui élaborent les lois, membres de gros partis, sont trop préoccupés par leur propre agenda électoral ? Les seules solutions contre le spam sont des « usine à gaz » (comme la double adresse email), inefficaces, lourdes à gérer pour l’administration et difficile à comprendre pour les administrés. Il faudrait plus de parlementaires issus de la société civile pour veiller à faire cesser ces aberrations.

En attendant ce changement de procédure, je me suis permis d’utiliser ce fichier des listes
électorales consulaires, comme la loi m’y autorise, pour faire un seul envoi afin d’informer les électeurs sur mes valeurs et mes idées.

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3 thoughts on “Nos emails sur les listes électorales sont privés

  1. La loi devrait s’appliquer à tout le monde non ? Pourquoi une proposition quand il suffirait de faire appliquer la législation existante ?

  2. Bonjour Fabien,
    La loi permet à certaines personnes de disposer des adresses email de tous les français à l’étranger. Parmi elles, il y en a qui abusent et sont difficilement condamnables parce que l’origine des emails est toujours difficile à prouver.

    La loi de 78 « informatique et liberté » et la directive européenne « vie privée et communications électroniques » sont bonnes mais le code électoral n’en suit pas l’esprit, c’est donc ce dernier que je propose de modifier. Et j’explique que son application serait au bénéfice de tous.